Fêter la Sainte-Barbe à Lens entre copines

Je ne suis pas très fan de Noël, mais j’adore les fêtes qui précèdent Noël, comme la Saint-Nicolas dans l’Est de la France ou la Sainte-Lucie suédoise. Ce sont des fêtes qui célèbrent la lumière au moment de l’arrivée de l’hiver et des nuits qui se font longues. Cette année, nous avons découvert avec beaucoup d’émotion la Sainte-Barbe à Lens et dans le bassin minier, qui se fête le 4 décembre.

Dans le monde minier, on célèbre Sainte-Barbe depuis bien longtemps, car c’est la sainte-patronne des trucs liés au feu et à la foudre. C’était la compagne des mineurs, en bas, au fond. A l’époque, pour ne pas travailler le 4 décembre, les mineurs faisaient des heures sup dans les semaine qui précédaient. Le 3 décembre, les derniers à remonter du puits ramenaient la Sainte-Barbe avec eux pour l’emmener prendre l’air le temps d’une procession et d’une bénédiction.

Malgré l’arrêt de l’extraction du charbon, la tradition a perduré – de manière plutôt confidentielle – à Lens et dans les environs. Depuis quelques années, l’agglomération a décidé de remettre cette fête au goût du jour et d’en faire un temps fort autour des arts du feu. Une idée brillante, car cette fête des lumières version charbon est éblouissante !

Avec d’autres blogueuses du collectif En France Aussi, nous avons évidemment répondu présentes à l’invitation de Florence, de l’office de tourisme de Lens-Liévin, pour fêter la Sainte-Barbe. Et quand le crew En France Aussi se retrouve à Lens, la bonne humeur, l’enthousiasme et la joie de vivre sont forcément au rendez-vous ! Les recettes d’une Sainte-Barbe réussie entre copines, ou comment passer un week-end génial dans le bassin minier en décembre : c’est ici que ça se passe !

Musée de l’Ecole et de la Mine de Harnes

Première étape pour se mettre dans le bain : direction Harnes, une petite localité près de Lens, pour découvrir un lieu atypique, le musée de l’Ecole et de la Mine. Un endroit comme on les aime, créé par un couple de passionnés, les Legrain. Dans cette ancienne école, madame Legrain a reconstitué une salle de classe des années 30 tandis que monsieur Legrain a réuni, avec l’aide de bénévoles, plusieurs objets et machines qui servaient dans les mines et qui sont mis en scène dans des dioramas au rez-de-chaussée. Il a également reconstitué une galerie de mine dans les toilettes de l’école en amenant une foreuse géante en pièce détachées qu’il a remontée dans le faux conduit.

La visite vaut le détour, car on ne peut qu’être impressionné par la passion qui a poussé ce couple à faire revivre l’atmosphère des cités minières. Il y a beaucoup d’objets du quotidien, dont certains sont très marquants, comme les radiographies des poumons des mineurs. C’est une visite vraiment complémentaire de celle du Centre historique minier de Lewarde, qu’on avait vu quelques semaines avant. Lewarde est très exhaustif, avec ses panneaux didactiques et ses visites bien rodées. Ici, l’intérêt est ailleurs.

Le musée est animé par une équipe de bénévoles très impliquées, qui fourmillent d’anecdotes personnelles sur ce qu’elles ont vécu autour de la mine. On peut échanger très librement avec elles et poser toutes les questions qui nous passent par la tête. Le temps file sans qu’on s’en rende compte.

La prochaine fois que nous viendrons, nous essaierons également avec plaisir l’escape game du musée (pour cette fois-ci, on avait déjà un escape game prévu, voir plus bas !).

Dracarys !

Après cette excellente introduction, nous sommes prêtes à en prendre plein les yeux. A la tombée de la nuit, nous nous mêlons à la procession de la Sainte-Barbe à Liévin. Nous suivons les anciens mineurs qui portent la Sainte-Barbe. Le public est très familial, et lors des haltes, la compagnie Pok Lux Factory 2.0 propose des chorégraphies lumineuses. Nous arrivons devant les Grands Bureaux de la compagnie des mines de Liévin et là, surprise : des feux d’artifice se mettent à illuminer la façade du bâtiment de briques. Ça claque de partout, le ciel commence à fumer et nous sentons que ce ne sera pas une nuit comme les autres.

La procession nous amène jusqu’à l’église Saint-Amé, où un mapping immersif nous attend. L’étape d’après se situe juste à côté : c’est le chevalement du 3bis de Liévin, qui se dresse sur le ciel sombre, comme un phare en pleine terre. C’est le moment d’une petite collation pour se réchauffer parce que, mine de rien, le froid monte peu à peu de l’herbe humide. Bonnets au vent, nous nous rapprochons tranquillement de la scène située au pied du chevalement pour assister au spectacle de feu de la compagnie Showflamme.

Un homme arrive sur scène, vêtu d’un costume d’heroic fantasy et se lance dans une Aria baroque tandis qu’en arrière-plan, un couple enchaine des arabesque autour d’un anneau placé à plusieurs dizaines de mètres du sol. Il s’agit du contre-ténor belge Dominique Corbiau, qui est accompagné des artistes de la compagnie Takapa. Le pari est osé, il suffirait d’un rien pour que la prestation soit kitsch, mais ça marche complètement. La voix du chanteur s’envole dans l’obscurité en même temps que les flammes autour de lui. Ça en jette !

Ensuite, l’artiste Lara Castiglioni de la Compagnie entre Terre et Ciel nous offre une danse des braises mystérieuse, mais pleine de charme. Même sans être forcément fan d’art de rue, le spectacle a vraiment de quoi plaire à tout le monde. Les copines sont unanimement conquises par la variété et l’originalité de la programmation.

Ring of fire

Pourtant, le meilleur reste à venir. Florence veut à tout prix nous faire découvrir le travail de la compagnie Carabosse, qui propose ce soir-là une illumination du site du 9-9 bis à Oignies. En parallèle de la Sainte-Barbe, cette installation commémore les 30+1 ans de la remontée de la dernière gaillette de charbon dans le Pas-de-Calais. C’est un moment intense qui nous attend, un moment qui restera gravé dans nos mémoires.

Dans la nuit, la silhouette d’un terril se découpe et les bâtiments sont cernés de flammes. Le 9-9 bis est un exemple très bien conservé de l’architecture industrielle régionaliste. Nous retrouvons les chevalements et les briques dans une atmosphère aux effluves d’essence. Des cercles de feux nous attendent pour nous mener jusqu’aux bâtiments tandis qu’une musique rock planante émane d’une petite scène. L’air semble mobile à cause du feu.

C’est le moment où je me souviens que : j’ai peur du feu, en fait. Quand il est loin, ça va, mais ici c’est une déambulation à travers le feu qu’on nous propose. La chanson de Johnny Cash en tête, je lâche prise et je traverse, moi aussi, ces anneaux de feu. En les traversant, je ressens toute la symbolique du feu : la purification, l’ardeur. Je me laisse entrainer d’un arbre de feu à l’autre dans cette ambiance unique.

Nous poursuivons la déambulation vers le bâtiment des douches, où les bleus de travail pendus au plafond gardent la mémoire des mineurs, puis vers le bâtiment des machines, où il y a une installation intitulée « Les Marcels », qui nous emplit d’émotion. Nous arrivons dans la pièce immense, plongée dans l’obscurité, où les machines sont encore en place. Des lampions flottent au-dessus de nos têtes et nous nous apercevons que ce sont en fait des débardeurs blancs illuminés. Les machines sont à l’arrêt, mais les petites flammes continuent de battre dans ces fantômes de tissu. C’est si simple et si beau à la fois. Notre cœur se serre au moment de quitter les lieux.

Les festivités de la Sainte-Barbe s’étalent sur une quinzaine de jours entre fin novembre et début décembre. Nous avons également vu les collages du street artist Levalet sur la base du 11/19 et nous avons fait un tour au bal de la Sainte-Barbe dans l’auditorium du Louvre-Lens (ambiance guinguette et danses de salon, on a tenté une petite valse maladroite, c’était très amusant). La programmation inclut des spectacles, des expositions, des projections, des lectures… Il y en a pour tout le monde !

Beaucoup de villes organisent des illuminations ou des événements autour de la lumière en décembre, mais ici, il y a quelque chose de plus. La Sainte-Barbe est ancrée dans le territoire, et les festivités rendent un hommage magique au patrimoine minier. C’est un festival d’arts et de feux, mais aussi une mise en valeur spectaculaire du territoire. C’est un festival avec une âme, tout simplement.

L’escape game Bollaert : Où est le président ?

Nous avons aussi profité de ce week-end pour faire un escape game au stade Bollaert avec les copines… Certaines étaient à fond, d’autres moins (on ne citera pas de nom), mais tout le monde a bien rigolé et c’est l’essentiel !!

Notre défi du jour : retrouver le président du club qui a disparu depuis plusieurs jours. Comment vous donner envie de tenter l’aventure sans trop en dire ? Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais voici quelques ressentis sur le jeu. Tout d’abord, fan de football ou pas, c’est vraiment sympa d’être dans les coulisses du stade mythique du RC Lens, car ici tout le monde vibre aux exploits de cette équipe. C’est dans ce stade nommé en hommage à l’ancien directeur de la Compagnie des mines de Lens que résonne la chanson « Les corons » à chaque match… Faire l’escape game dans le stade donne donc un côté super authentique.

Sans vous spoiler, je voudrais juste saluer le storytelling soigné de l’énigme qui nous fait entrer direct dans l’aventure. Le décor est également bien trouvé. Les énigmes s’enchaînent, ni trop faciles pour ne pas s’ennuyer, ni trop dures pour ne pas se planter. Il y a bien sûr les classiques codes et cadenas, mais il y a aussi quelques astuces assez surprenantes qui font rebondir l’intrigue. Il s’agit à mon avis d’un escape game de difficulté moyenne qui permet de passer une chouette matinée en famille ou entre ami.e.s.

Les bonnes adresses du week-end

Où dormir avec ses copines ?

Notre bande de blogueuses a été logée dans le gîte Suite d’histoires, à Liévin, une excellente adresse qui peut accueillir 2 à 8 personnes, au cœur du bassin minier et proche des lieux de la procession de la Sainte-Barbe. C’est une grande maison, hyper cosy, très soigneusement décorée. La grande cuisine est parfaite pour accueillir une tablée de copines endormies au petit-déjeuner ou affamées en fin de soirée. Il y a plusieurs pièces communes, ainsi qu’un joli jardin. Les chambres sont également très agréables (on a même eu droit au lit de princesses, la chance).

Le bonus, c’est l’accueil de Monique, Bernadette et Valentino, qui ont mis tout leur cœur dans cette maison et qui partageront avec vous leur amour et leurs histoires du bassin minier. Une adresse authentique, comme on les aime, où passer un week-end super convivial !

Où manger dans le bassin minier ?

Deux belles adresses à retenir, dans des styles différents, pour ce week-end du feu de dieu (j’avais parié que je plaçais ce jeu de mots, désolée) :

  • L’Atelier de Marc Meurin, sur le parvis du Louvre-Lens. Nous y avions déjà été, et le coup de cœur est confirmé ! Chef étoilé originaire de Lens, Marc Meurin propose ici une adresse bistronomique qui fait la part belle aux produits locaux – comme ce parfait glacé à la chicorée en dessert. On sent que c’est l’endroit où les locaux se retrouvent pour fêter une occasion spéciale, ce qui rend l’ambiance vraiment conviviale. Le service est attentionné et efficace et, bien sûr, les papilles sont en fête. Le plat de canette aux pommes de terre et navets était simple et savoureux. Un incontournable pour se faire plaisir. Menu du marché à 33 euros.
  • La Maison d’Ingénieur, une nouvelle adresse vraiment chouette à Loos-en-Gohelle, tout près des terrils du 11/19. Grâce à l’association Porte Mine, cette demeure en briques située au cœur d’une ancienne cité minière a été transformée en tiers lieu qui combine un restaurant, un hôtel, une programmation culturelle, un jardin et de nombreux projets solidaires. Nous y avons brunché le dimanche, le brunch était bon et copieux, et il y avait un petit concert. Nous avons pu jeter un coup d’œil aux chambres, qui sont très cosy. Il y a même des dortoirs avec vue sur les terrils ! Des ateliers sont proposés aux habitants (jardin, bricolage, aide aux devoirs…). Bref, le genre d’endroit qu’on a envie de soutenir.
  • On n’oublie pas la friterie de la piscine, à Liévin qui nous a sauvé la vie le samedi à 23 heures alors que nous étions affamées !! Merci Sainte-Barbe pour les friteries.

Nous étions véhiculées pour ce week-end, ce qui était plus pratique étant donné que les différents événements étaient disséminées tout autour de Lens. Toutefois, ces adresses sont aussi accessibles en vélo, car les distances ne sont pas trop grandes (hormis pour le 9-9 bis). Rendez-vous à l’Office du tourisme pour louer des vélos ou des trottinettes électriques !

Retrouvez d’autres bonnes adresses à Lens et aux environs dans notre article In Love de Lens !

En 2022, Lens fête les 10 ans du Louvre Lens et de l’inscription du bassin minier au patrimoine de l’Unesco. C’est une super occasion de découvrir ce territoire si vous n’y êtes pas encore allé.e, et il y aura plusieurs événements tout au long de l’année pour célébrer cet anniversaire. La Sainte-Barbe 2022 sera le point culminant de cette programmation. Un événement à ne pas rater !

Chaque séjour dans le bassin minier nous fait aimer un peu plus ce coin et ses habitants. Les fêtes de la Sainte-Barbe sont une occasion unique de s’immerger dans ses traditions. Tout ce que l’on souhaite, c’est que ce territoire garde toujours vive cette flamme qui l’anime.

Un immense merci à Florence et à Chacha pour l’organisation de ce blogtrip ! Merci à l’Office de tourisme de Lens-Liévin de nous faire vivre de si beaux moments.


6 réflexions sur “Fêter la Sainte-Barbe à Lens entre copines

  1. Merci, Paule-Elise et Hélène pour ce remarquable texte et les photos. Oui, cette année 2022 marquera les esprits avec les 10 ans du Louvre-Lens et l’inscription du bassin minier au patrimoine mondial. Je me rappelle les années 90 où nous mettions en place des projets patrimoine avec les scolaires et les témoignages d’anciens mineurs (presque tous disparus aujourd’hui, malheureusement). Nous passions pour des rêveurs et l’on souriait lorsque nous parlions de ce patrimoine minier. Nous avions raison et jamais, nous n’avons baissé les bras. En relisant ce que nous avions réalisé à ce moment, avec de faibles moyens, je crois que nous pouvons en être fiers. En toute humilité, mais avec raison, nous avions des années d’avance. J’ai beaucoup d’estime notamment pour le maire de Loos-en-Gohelle et d’autres élus qui ont ardemment défendu ce patrimoine minier, qui ouvre l’avenir, à travers ses traditions comme la Sainte-Barbe, ses paysages qui, d’un « archipel noir » sont devenus un « archipel vert ». J’espère, au printemps prochain, pouvoir gravir à nouveau les plus hauts terrils d’Europe (que j’ai désertés depuis 2016) et contempler le panorama qui s’offre à nos yeux. Amicalement, je vous embrasse.

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    1. Merci Philippe, en effet vous pouvez être fier de tout le travail accompli sur votre territoire, qui mérite vraiment qu’on s’y intéresse ! J’espère que l’année 2022 sera bonne pour tous les acteurs qui sont si engagés dans cette dynamique.

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  2. Je suis toujours un peu jalouse de vos voyages de com ! Celui-là en particulier a tout pour plaire, entre bonne ambiance et cette fête des lumières qui rend hommage au patrimoine minier. La déambulation dans les arceaux enflammés a dû marquer les esprits.

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    1. C’est vrai qu’il y a toujours une bonne ambiance dans ces blogtrips, j’adore y participer ! Peut-être que tu arriveras à te joindre à nous une fois, après tout Annabelle en a déjà fait ! Et c’est vrai qu’à Lens on est toujours très très bien reçues. Il y a un vrai lien entre le collectif et ce territoire, ça marche bien.

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