Retrouver l’été

C’est peu dire que cet été 2020, l’été du Covid, n’était pas un été comme les autres. Un été aux saveurs de toutes premières et de toutes dernières fois, coincé entre un printemps perdu et un automne incertain.

Qu’est-ce que cela a changé pour nos voyages, le Covid ? A la fois tout et rien. Tout, parce que le Covid modifie nos habitudes quotidiennes, nos relations sociales, nos déplacements. Rien, parce que nous avions déjà l’habitude de ne pas partir loin pendant l’été. Le van a introduit une autre temporalité dans nos voyages depuis cinq ans maintenant, et cela n’a donc pas été un renoncement de passer nos vacances en France, au contraire.

Malgré ce contexte étrange, nous avons passé un été précieux et savouré encore plus chaque moment. Voici donc la chronique un peu fourre-tout de notre été 2020, placé sous le signe des retrouvailles.

Retrouver les proches

Le Covid a rebattu nos priorités et le premier critère pour organiser les vacances cette année était de retrouver les proches. Après des mois de séparation, le choix de nos destinations était vraiment secondaire. Mon frère aime les destinations sexy (mais bondées) comme la Corse ou le pays basque ? Soit, on s’adaptera ! (Vous avez du mal à compatir, je le sens). Cet été, on a voyagé avec le cœur comme boussole, et pas la tête.

Si vous nous avez suivies sur les réseaux sociaux, vous aurez vu des photos de plages magnifiques, d’eau turquoise ou opaline, de lacs bordés de sapins, de randonnées en bord de mer ou en forêt. Vous aurez vu Ajaccio, Brive, Chenonceau, Saint-Jean-de-Luz ou Lens.

Hors champ, il y avait une nièce de deux mois, une filleule neuroatypique de 13 ans et ses deux sœurs, des beaux-parents, de chers amis, un frère et une belle-sœur, et même un cousin turbulent pour Madeleine, notre vieux chat.

Hors champ, il y avait la joie très particulière de retrouver celles et ceux qu’on aime, malgré les saluts maladroits et les efforts pour garder la distance. Hors champ, il y avait l’envie implicitement partagée de profiter du moment présent, de rattraper le temps perdu et de prendre un peu d’avance, au cas où.

Certes, on aurait bien aimé que le Covid, lui aussi, prenne des vacances. Mais il était bel et bien là, impossible de l’oublier.

Ainsi, le premier jour où nous étions à Ajaccio, nous sommes allées à la plage. J’avais mon appareil photo autour du cou, ce qui indiquait mon statut de touriste. Alors que nous installions nos serviettes, à deux ou trois mètres des plus proches voisins, une dame nous a demandé de nous installer plus loin. Nous avons obtempéré calmement, après tout sa réaction était compréhensible même si elle ne nous a pas fait plaisir.

A l’inverse, il est arrivé plusieurs fois pendant notre semaine en Corse que nous ayons envie de dire à des mecs de 50 ou 60 ans qui travaillaient en contact avec les touristes de mettre leur masque. Chacun a vraiment un ressenti propre avec ce virus, et la coexistence de ces ressentis est souvent compliquée.

Au camping, par contre, il valait mieux ne pas trop penser au Covid. Bien sûr, on passe son temps dehors et on évite les milieux confinés. Mais on partage aussi les sanitaires et les douches… Là, il n’y a qu’à croiser les doigts ou invoquer tous les saints patrons du camping pour que tout aille bien. (Il y a forcément des saints patrons du camping, non ?)

Un autre Covid-souvenir. Le long de la plage de Saint-Jean-de-Luz, les stands de glaces côtoyaient les tentes de dépistages gratuits au Covid. Le port du masque était obligatoire dans le centre-ville, comme à Biarritz. Les prémices de ce qui nous attendait à Paris au retour.

En fait, c’est fascinant et effrayant à la fois, la façon dont on s’adapte. On continue, on est en vacances coûte que coûte, on met le masque, on ne se fait pas la bise. Pourtant, les doutes nous taraudent aussi. On aurait peut-être dû rester à la maison, éviter tout déplacement. L’équation est complexe : garder les distances ou garder le moral ? A chacun de trouver son équilibre.

Retrouver Lorette

Il n’est pas de vacances dignes de ce nom sans un passage dans les Hauts-de-France, voire même sans un passage dans le Pas-de-Calais, voire même sans un passage à Lens. Mi-juillet, nous avons enfin retrouvé notre exposition « Vest Pocket Memories » au mémorial de Notre-Dame-de-Lorette. Elle devait fermer le 17 mai, mais elle a été prolongée jusqu’au 30 août, après avoir été complètement fermée pendant deux mois.

Cette prolongation nous a laissé le temps d’organiser des temps de rencontre. Nous y tenions tellement. Nous avions envie de partager de vive voix notre projet et d’échanger avec le public. Certes, il a fallu s’adapter, mais en organisant des ateliers en extérieur, avec port du masque et en jauge réduite, nous avons pu maintenir le programme que nous avions prévu.

Mi-juillet et fin août, nous avons donc passé deux week-ends à Lens spécialement pour ces rencontres et les retours des participants nous ont vraiment fait chaud au cœur. Au final, il s’est créé autour de cette exposition et de ce petit appareil photo une communauté vraiment attachante avec qui nous avons adoré échanger.

Alors oui, 2020 n’était certainement pas la meilleure année pour se lancer dans une carrière d’artiste, mais ces moments nous ont boostées. Nous avons pu clôturer l’exposition sans aucun regret… Avec l’envie encore plus forte de continuer !

Retrouver l’été

Au moment du déconfinement, je crois avoir ressenti ce que ressent une marmotte sortant d’hibernation. (J’aurais bien mis « ours » à la place de « marmotte », mais il faut être lucide, je ressemble plus à la deuxième qu’au premier).

Lors de mes premiers déplacements hors du kilomètre de confinement, je me suis sentie aveuglée, grisée et effrayée de retrouver le grand monde extérieur. J’étais déboussolée, en fait, et cela a pris quelques semaines pour que je me réhabitue. Et puis je me suis réaccoutumée, mais avec une conscience accrue. C’était comme si tous mes capteurs sensoriels redécouvraient l’été.

Chaque bonheur avait le goût de la nouveauté : voir des biches traverser la route en Sologne, observer un couple de rapaces chasser à heure fixe devant notre spot en Corrèze, sursauter quand un serpent a détalé devant nous dans la forêt, subir les moustiques et les guêpes, faire découvrir l’eau à un petit chien, rouler sur la nationale fenêtres ouvertes, nager jusqu’au plongeoir, traverser des vignobles, entendre des langues étrangères autour de soi, se blottir dans le van quand les éclairs tonnent, oublier l’heure.

Nous avons savouré comme jamais les plaisirs du roadtrip lent, les découvertes de villes comme Orléans, Tulle, Marmande ou Loches au gré d’une balade, d’une nuit ou d’un repas. Nous avons arpenté des départementales défoncées en Nouvelle-Aquitaine et évité l’autoroute au bitume brûlant. Dans les Landes, les routes sont si droites que le moindre virage fait l’objet d’une abondante signalétique. Sur la nationale entre Angoulême et Poitiers, on a trouvé par hasard une cafeteria lusophone qui nous a ramenées là-bas, au Portugal, comme un voyage dans le voyage.

L’été 2020, on ne l’oubliera pas de sitôt. Il a tenu ses promesses malgré tout, des nuits chaudes d’Ajaccio aux balades venteuses de Wissant. Moi, je garderai toujours une préférence pour le creux du mois d’août et les réveils apaisés des lendemains d’orage.

Et pour vous, comment était-il, cet été 2020 ? Qu’est-ce que le Covid a changé dans vos voyages ? Racontez-nous en commentaire !


12 réflexions sur “Retrouver l’été

  1. J’ai lu votre billet avec un fond sonore de la bossanova et je termine avec les yeux.
    Le soleil, le ciel bleu et vos sourires c’est juste merveilleux à voir.

    …. Cet été, on a voyagé avec le cœur comme boussole, et pas la tête….. résume très bien ce bien

    Merci pour ce beau partage

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  2. L’été s’est fait en France comme presque tout le monde. J’avais pris l’habitude, depuis quelques années, d’aller à l’étranger l’été ne supportant plus les français lourds en vacances. J’ai eu beaucoup de plaisir à voyager dans mon beau pays, et au moins, pas de gestion de devises étrangères ou de langues complexes ! 😀 Je suis allée dans le sud du Finistère, je connaissais un peu d’autres coins de Bretagne, mais là c’était une totale découverte. J’ai adoré, et comme c’était début juillet, il n’y avait pas encore trop de restrictions. A part dans les commerces et musées, il n’y avait pas de port du masque en extérieur. Mais la semaine après notre retour, le masque a été rendu obligatoire dans la ville close de Concarneau.

    Vous avez beaucoup voyagé cet été, la Corse, j’aimerais bien y retourner un jour, hors-saison si possible ! C’est super que votre exposition se soit très bien terminée, quelle expérience ! 😀

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  3. Le covid a eu du bon (oui oui) et du moins bon. Nous n’avons pas regretté l’annulation de nos vacances à Minorque. Nous avons découvert une nouvelle région de France qui nous a séduits. Minorque sera pour une autre année, on ne sait juste pas quand…
    Votre été a eu la douceur d’un réveil de confinement.

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  4. J’ai eu beaucoup de plaisir à vous lire! Entre craintes à certains endroits et grands bonheurs de vacances, nos doutes sont souvent légitimes. Mais au final et paradoxalement à la situation actuelle, je l’ai bien aimé cet été 2020 qu’on a tous du apprivoiser, lentement et autrement!

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